Ada Tech School : l’école d’informatique à Paris alternative, inclusive et féministe
Ada Tech School est une école d’informatique d’un nouveau genre. Elle forme des développeuses et développeurs généralistes en 2 ans en utilisant des méthodes pédagogiques alternatives. Elle attire une majorité de femmes, sans imposer de quotas.
Free-Work a interviewé Claire Noudelmann, Head of Growth and Marketing de l’école, pour en savoir plus sur cet enseignement pas comme les autres.
Free-Work : quelle est l’histoire d’Ada Tech School, école d’informatique située à Paris ?
Claire Noudelmann : Ada Tech School a été créée par Chloé Hermary à l’âge de 25 ans, à la sortie de ses études d’entrepreneuriat à HEC (Hautes Etudes Commerciales). Passionnée par l’éducation et les méthodes pédagogiques alternatives, elle a fait le constat que ces dernières étaient peu mises en oeuvres dans l’enseignement supérieur et que c’était dommage de ne pas en tirer parti.
Pendant sa phase de réflexion sur son projet, elle rencontre plusieurs personnes travaillant dans le milieu informatique, un secteur à haut potentiel de recrutement qui manque cruellement de femmes informaticiennes ! Elle fait notamment la connaissance de Yannick François, développeur depuis plus de vingt ans et expert de nouvelles méthodes d'enseignement dans l'informatique.
C’est grâce à cette rencontre qu’elle finalise son projet : créer une école d’informatique inclusive et féministe, dans laquelle on apprend à coder à l’aide d’une pédagogie alternative qui peut aider à apprendre l’informatique.
L’école est lancée en octobre 2019, avec la première promotion. Elle forme en 21 mois (9 mois à l’école + 12 mois en alternance) au métier de développeur.se, dans un réel objectif d’insertion professionnelle.
L’école est ouverte aux femmes et aux hommes. Elle est donc mixte. Les promotions comptent en moyenne 70 % de femmes et 30 % d’hommes, chiffres obtenus sans mise en place de quota.
Il est important pour nous qu’il y ait plus de femmes que d’hommes dans chaque promotion. Ada Tech School porte également une attention toute particulière à diversifier lors du recrutement les origines sociales, culturelles, de formations, etc. La représentativité doit être présente au sens large.
Nous avons ouvert deux campus : un campus situé gare de l’Est, à Paris et un à Nantes (ouverture en octobre 2022). L’objectif est de nous développer dans d’autres villes françaises, en fonction des besoins.
Comment Ada Tech School fait-elle pour recruter des femmes vers une formation de développeuse ?
C’est la manière de communiquer d’Ada Tech School qui motive les femmes à venir se former chez nous. Nous faisons connaître le métier de développeur.se différemment. Nous démontrons que le développement informatique fait appel à la logique et non pas à des compétences en mathématiques, comme beaucoup trop de gens peuvent le croire. Nous utilisons de nombreux témoignages de femmes qui sont en formation chez nous pour inspirer et faire naître des vocations.
Nous animons des conférences sur des thèmes qui nous tiennent à cœur : la pédagogie, le féminisme, l'inclusion dans les entreprises tech. Nous organisons des ateliers de code gratuits. Cela permet de lever les barrières à venir se former au développement informatique. Nous proposons aussi un kit de débutant avec notamment des tutos sur Youtube.
Par ailleurs, nous allons chercher les femmes là où elles se trouvent, notamment sur des comptes Instagram et communautés féministes.
Toutes ces actions permettent de lever des biais et des stéréotypes liés aux métiers de l’informatique.
Quels sont les critères de sélection pour entrer à Ada Tech School ?
Nous ne demandons aucun prérequis technique. Le seul critère de sélection est d’avoir plus de 18 ans. Cela dit, cela reste une école sélective. Nous sélectionnons les candidats sur trois critères :
la motivation grâce à des tests et un entretien en visioconférence,
la maturité par rapport au projet d’orientation pour vérifier que la personne s’est bien renseignée sur les métiers de l’informatique,
la capacité à collaborer en groupe, car un développeur travaille en équipe, contrairement aux idées reçues.
Quel est le profil des femmes intégrant Ada Tech School ?
Il n’y a pas de profil type. Les personnes viennent d’écoles d’art, d’écoles de commerce, du secteur paramédical, etc. C’est vraiment très varié. La moyenne d’âge est de 27 ans, mais la tranche d’âge des apprenants s’étend de 18 à 50 ans.
Si nous catégorisons les profils, nous pouvons en observer trois principaux :
les personnes arrivant post-bac,
les profils en réorientation en cours d’études supérieures,
les profils en reconversion professionnelle.
Est-ce la composition à majorité féminine des promotions qui attirent les femmes à Ada Tech School ?
Non, les deux arguments qui attirent avant tout les femmes pour venir se former à Ada Tech School sont les valeurs d’inclusion et de bienveillance, qui règnent dans l’école et sa pédagogie alternative.
Le fait qu’il y ait beaucoup de femmes est un plus, mais ce n’est pas la première raison qui pousse les femmes à venir étudier chez nous.
Vous revendiquez une pédagogie alternative pour apprendre à coder. Quelle est cette méthode ?
Notre pédagogie se base sur la pratique. Nous ne dispensons pas de cours théorique. L’objectif pour les apprenants est de reprendre le pouvoir sur leur formation. C’est pourquoi nous parlons d’empowerment (responsabilisation en français). Il est important pour nous également d’éradiquer la compétition : les apprenants se challengent eux-mêmes. Nous avons mis en place un système de badge, dans lequel les personnes s’évaluent elles-mêmes, avant même l’encadrant.
La pédagogie descendante est totalement absente chez Ada Tech School. Nous ne parlons pas de professeurs, mais d’encadrants et de coachs. Comment se déroule notre formation ? Les apprenants étudient des notions théoriques en amont grâce à des vidéos, des podcasts, des articles à lire, etc. Ensuite, la personne valide ce qu’elle a appris avec des exercices techniques et à travers un projet réalisé en binôme, puis en groupe.
Il existe également des projets plus longs, sur deux semaines, qui se déroulent en groupe de 4 à 5 personnes avec un objectif à la fin comme coder un jeu vidéo ou encore un site de e-commerce de meubles. Les apprenant.e.s sont alors guidés avec des "fiches arbres" avec différentes "branches" possibles pour arriver à leur objectif. Le dialogue et la collaboration est alors primordial, dans ce travail de groupe.
Nous démontrons, grâce à notre méthode alternative, que les chemins sont multiples pour arriver à un résultat : culture du test, inventivité, expérimentation, etc. C’est tout cela que nous valorisons.
Enfin, notre pédagogie est très professionnalisante : nous utilisons des méthodes appliquées en entreprises, comme la méthode agile.
Quels sont les partenariats mis en place avec les entreprises ?
Nous avons noué des partenariats avec une quarantaine d’entreprises : start-up, ESN (Entreprises de Services Numériques), grands groupes (TF1, ManoMano, BlaBlaCar, Leboncoin, Back Market, Doctolib, etc.). Les entreprises s’engagent à recruter un.e alternant.e au moins une fois par an.
Toutefois, chaque apprenant reste acteur de sa formation et de sa recherche d’entreprise pour l’alternance. C’est pourquoi nous organisons des entretiens blancs (un entretien de ressources humaines et technique), des master class, etc., pour entraîner les apprenants à la recherche d’emploi. 90% des apprenants trouvent une alternance grâce au réseau d’Ada Tech School.
Quel est le bilan ? Que font les femmes en sortant de l’école ?
Sur la première promotion sortie fin 2021, nous obtenons 100 % de taux d’employabilité, c’est-à-dire que l’ensemble de la promotion a trouvé un CDI (Contrat à Durée Indéterminée), à des postes de développeur junior dans des start-up, scale-up, grandes entreprises, etc. Donc le bilan est plus que positif !
Qu’est-ce qui est apprécié par les employeurs chez les développeuses sortant d’Ada Tech School ?
Les développeuses d’Ada Tech School sont très appréciées par les employeurs pour les qualités suivantes :
la débrouillardise,
la créativité pour trouver des solutions sur des problèmes donnés,
la connaissance des langages de programmation très liés au monde de l’entreprise,
la bonne intégration au sein des équipes,
la très bonne compréhension des problématiques à résoudre.
Les femmes sont peu nombreuses dans les écoles d’informatique et dans les métiers du numérique. Pour quelles raisons ?
Oui, les femmes sont peu nombreuses dans les métiers de l’informatique en raison des différents stéréotypes véhiculés sur ces métiers : des métiers solitaires, masculins, pour lesquels il faut être matheux, scientifique, etc. Le manque de représentativité des femmes alimente le stéréotype. C’est un cercle vicieux. En outre, les femmes se posent la question : « est-ce que j’ai envie d’étudier et travailler uniquement avec des hommes ? »
Tout se joue à l’école et au niveau de l’orientation scolaire : on oriente moins les femmes vers les filières scientifiques. Il y a souvent aussi l’entourage, notamment les parents, les amis ou les professeurs qui challengent le projet d’aller vers l’informatique.
C’est bien dommage car le potentiel des métiers du numérique est énorme pour les femmes !
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