Marché IT sous tension : comment s’en sortir ?

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Nous poursuivons notre série d’interviews de membres de la plateforme Free-Work pour partager leur parcours et leur retour d’expérience dans la tech. Après l’interview de Yohann Haddad en octobre, Yaël Cheenne a accepté notre invitation.

Du haut de ses 4 décennies d’expérience, Yaël nous livre tout ce qui a marché et fonctionne encore pour lui dans ses activités d’indépendant depuis 25 ans ! Nous abordons avec lui son point de vue sur les besoins du secteur de la tech et les fondamentaux d’un indépendant qui vise le succès dans la durée. 

Quel est votre constat sur le marché IT actuel côté freelance ? 

Le marché se tend notamment sur des populations ciblées comme celle des développeurs web, un des métiers de la tech accessible au plus grand nombre. Depuis une décennie déjà, nous avons assisté à une baisse de l’accélération des demandes et en parallèle, le nombre de personnes devenant freelance a augmenté. Le marché est sous tension et par ailleurs, au niveau des acteurs de recrutement, l’atomisation des acteurs rend le marché moins lisible. Malgré la situation, certains s’en sortent car nous ne sommes pas tous développeurs Web 😊

Dans l’industrie, il y a un potentiel important ! 

Où sont les besoins aujourd’hui ?

Tech, IT, OT, Tertiaire, Banques, Assurances, Juridique …  Un exemple frappant : l’industrie … peu investissent le marché, alors qu’il y a un potentiel important …

D’autres domaines fluctuants sont ainsi demandeurs : Data, Intelligence Artificielle, Blockchain, Cybersécurité, IIoT, Robotique, Management, Juridique, Green. En développement, les langages et frameworks comme HTML, PHP, Python, Java, Cobol, GO, RUST, C/C++/C#, React, Django, Node …ont le vent en poupes.

Ajouter chaque année des cordes à son arc.

Dans un monde fluctuant, quelles sont les clefs pour maintenir le flot ?

J’en citerai trois : se former en continu, diversifier ses offres et réseauter à travers des activités différentes. Particulièrement dans la tech, les compétences recherchées évoluent très vite et les cas d’usage sont pléthores. A chacun, chacune, de se concentrer vers ce qui le passionne le plus et d’ajouter chaque année des cordes à son arc. Nous avons la chance aujourd’hui de pouvoir nous former de mille façons : formations classiques, mooc, boot camp, hackathon, e-learning, certifications, master class, conférences, salons, séminaires, congrès, clubs professionnels… et pourquoi ne pas envisager de devenir formateur/trice en IT, c’est autant d’occasions de rencontrer de nouvelles personnes et de pouvoir ensuite proposer des services additionnels à ses potentiels clients. Personnellement, je suis freelance depuis plus de 25 années et totalisant environ 39 années d’expériences). En ce moment, par exemple, j’ai cinq activités principales (régies et forfaits) : 

  • Conseil en Systèmes d’Information et Innovations Technologiques,

  •  Migrations de systèmes legacy (hard/soft/dev), 

  • Designer/Maker IIOT : agro, défense, santé (focus handicap), 

  • Data Protection Officer (DPO) / Digital Ethics Officer (DEO) pour TPE/I/PME/I,

  • Formations Cybersécurité, RSSI, Management, Droit (M2 alternants Juristes Entreprise).

Quelques samedis, je m’investis aussi dans une association et un LinuxUserGroup pour une meilleure intégration des jeunes filles dans le numérique à travers des ateliers ludiques de domotique et de robotique.

Je donne aussi des cours de pâtisserie et de chocolaterie ☺ En diversifiant, je me fais connaître au plus grand nombre ! Je suis aussi adhérent à des réseaux privés d’entreprises, et à un Club de Jeunes Dirigeants (CJD).

En diversifiant mes offres, je me fais connaître au plus grand nombre.

Tout le monde est-il fait pour être freelance ?

Non ! Et malheureusement, la société, les médias, les influenceurs nous font croire que si en vantant des résultats hors du commun sans parler du seul nerf de la guerre qui vaille : l’état d’esprit. Alors, non, le monde n’est pas constitué à 100% de ces personnalités ! Je vois trop souvent des personnes se lancer sans aucune réflexion sur eux-mêmes. Être freelance c’est du management de risques au quotidien, calculés et mesurés. C’est vivre le plus sereinement possible (avec les échecs), se remettre en cause fréquemment avec humilité et vivre décemment de son travail, pour soi et sa famille. Par ailleurs, il ne faut pas oublier que nos institutions n’ont pas été faites pour le freelance. Si vous voulez acheter un appartement, l’emprunt est un défi… Si votre expérience est un échec, vous n’avez pas le droit au chômage (cela dépend des situations). Il faut aussi se demander si c’est le bon et juste moment pour se lancer : Notre nombre d’années d’expérience sur le marché est-il suffisant par rapport aux besoins des entreprises ? 

Être freelance, c’est du management de risques au quotidien.

Ça s’apprend d’être freelance ?

 Oui, aussi, en partie. Quand vous êtes freelance, vous êtes … tous les rôles en même temps : gestionnaire, commercial, communiquant, administrateur, planificateur, expert. Les novices idéalisent le métier : la marche à franchir & la claque peuvent vite arriver. 

Certains apprécient d’affronter les tâches administratives, histoire de rester maître de leur destinée, de déléguer à un tiers : expert-comptable, avocat, juriste, de compenser leurs manques : compétences commerciales, communication …

Être freelance, c’est être tous les rôles en même temps.

Avant de se lancer, je recommande de :

  • Réfléchir avant d’agir (état d’esprit, culture, vision, ce que l’on veut ou pas),

  • S’acculturer à la connaissance et à la gestion d’une entreprise (si on a créé une SASU ou une EURL, savoir lire son exercice comptable et gérer sa trésorerie ça s’apprend).  Cela peut être dispensé via les CCI, France-Travail, Associations, AGA : 2 à 3 jours, en CPF).

  • Évaluer les risques de bout-en-bout (impacts famille / professionnels)

  • S’entourer et se faire accompagner (famille, experts, freelances établis, tiers),

  • Avoir une avance financière permettant de vivre décemment (de 3 à 6 mois)

  • Disposer d’un contrat dument signé avant la réalisation de toute mission.

Un mot de la fin ?

Être freelance, c’est être à la fois un « Éternel Étudiant-Voyageur », un « Vagabond des Limbes »* et un « Passager du Vent Numérique ! »*.

*ce sont des séries de bandes dessinées 😊 

Interview de Yaël Cheenne par Caroline Loisel. 

Elle est solopreneure depuis 11 ans : conférencière, podcasteuse et auteure sur la qualité des relations humaines et les usages des technologies. 

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