Grille salariale, formation puis démission
Salut à tous,
Je souhaiterais partager une expérience à propos de la formation en entreprise provoquant des démissions. Il sera encore question de valeur et de prix dans ce post.
Mon client, avec une DSI de 400 personnes, dispose de très peu de DevOps dans sa structure. Or, aujourd'hui, la plupart des processus qui consistent à déployer des serveurs, déployer des réseaux, déployer des protections réseaux, etc, se font à travers une chaine logicielle de type CI/CD.
Les briques utilisées sont, à grosse maille :
des repositories pour les objets complexes de type images de serveur ou artefacts. (ex : AMI)
des repositories pour le versionning, l'isolation des branches par projet (ex : Gitlab)
des workers pour exécuter des ordres logiciels. (Il faut bien que les ordres d'automatisation s'exécutent quelque part)
des procédures de tests (Quality Automation, quelque soit la forme que ça prend. Ca peut être du python, du selenium ou autres...)
des procédures de déploiement des landing zones et/ou des environnements. (Là où vont atterir les serveurs pendant les phases de tests, de preprod et de prod)
des procédures d'orchestration du RUN. (Si un serveur subit une pression CPU ou RAM, alors on en remonte un à côté et on décomissionne le serveur malade).
etc....
Tout le principe du DevOps est d'être aussi compétent en ingénierie logicielle qu'en ingénierie infra.
Hier, j'ai eu une grande conversation avec le président d'une société de formation qui me demandait son appui pour rentrer chez mon client.
Au bout de la conversation, je me suis rendu compte de quelque chose d'assez handicapant pour mon client.
Dans la boite, il y a des grades : Technicien, administrateur, expert, manager de proximité, manager de département, manager CODIR, manager COMEX, etc....
Dans la boite, il y a une grille salariale associée à ces grades. Les marges de manœuvre sont assez faibles, si bien que récemment, on a vu un responsable réseau recruté à un grade "manager de département" pour pouvoir matcher avec le salaire demandé.
Comme nous ne parvenons pas à recruter sur notre grille de salaires (DevOps à 42K€....heummm...), nous avons la possibilité de faire monter nos employés en compétences.
J'ai plusieurs remarques à ce sujet :
Selon l'expression consacrée "on ne fait pas boire un âne qui n'a pas soif". Autrement dit, si les employés étaient intéressés par le sujet DevOps, ils n'ont absolument pas besoin d'être pris en charge pour se former.
Aller former un mec de force, alors qu'il n'a pas montré d'intérêt pour la techno, c'est le crash assuré.
Si le gars est en mode "boulet", le coût de la formation est assez conséquent pour la boite. Autrement dit, si pendant 15 ans, tu ne t'es pas intéressé à ce qu'est une adresse non routable.... Il y a beaucoup de chances pour que tu sois très handicapé pendant la formation puisque tu dois apprendre le B-A-BA plus les vraies techniques DevOps. Ca fait beaucoup à la fois.
Autre aspect évident:
une fois que le mec aura augmenté sa valeur sur le marché de 40k+ à 50k+, il y a peu de chances pour qu'il reste dans la boite à un prix de 40k+. C'est juste mécanique.
Donc, le pipeline qui se dessine, c'est :
l'entreprise forme des DevOps
On met un avenant dédit-formation de 2 ans avec une pénalité de 3000 euros à la clé.
Le mec va faire +10k€ sur son salaire, donc, les 3000 de pénalité, c'est juste une blague.
Le mec démissionne au bout de quelques mois, juste le temps d'avoir expérimenté l'environnement DevOps de son employeur initial.
Pas glop !
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VincentB_
Nombre de posts : 2395Nombre de likes : 953Inscrit : 11 juillet 2022Bonjour,
Ce mode de gestion du personnel n'est pas propre à l'IT. J'ai vécu ça et si je suis parti... il y a une raison.
Notez que c'est souvent associé à une évolution salariale associée à de l'ancienneté plus qu'aux compétences.
Si vous faites ça dans un environnement très concurrentiel s'agissant du marché du travail, c'est le crash assuré à terme.
Pas glop pas glop en effet...
Avocat (non, pas celui qui se mange) -
_Fred_
Nombre de posts : 750Nombre de likes : 321Inscrit : 1 mai 2015Je suis d'accord, en partie, mais il y a des points qu'il faut prendre en compte et qui sont primordiaux pour l'évolution d'une entreprise :
Aller former un mec de force, alors qu'il n'a pas montré d'intérêt pour la techno, c'est le crash assuré.
Oui s'il s'agit d'une formation façon "culture gé", réflexe typiquement français.
Par contre, une entreprise doit établir des compétences seuil pour chaque poste et s'assurer que les employés ont le niveau attendu. Si quelqu'un occupe un poste pour lequel il n'a pas les compétences, il doit accepter d'être formé ou de dégager. Attendre que les gens "veuillent" est incompatible avec la notion de salariat. Les gens "doivent" en échange de ce salaire, et certes avec toutes les notions d'accompagnement collaborateurs qui sont importantes et non dictatoriales.
Et il serait très surprenant de considérer que l'employé a les compétences parce qu'il a le diplôme, ou d'attendre qu'il se forme spontanément.
La valeur morale moyenne n'est pas du tout la même répartition qu'une mentalité freelance typique. L'autonomisation est rarement présente et la proactivité de même, surtout dans des grandes boites à forte inertie. Les salariés ont plus souvent la tendance à se laisser porter qu'à remettre en question leur présence et leur participation dans l'entreprise, y compris en ce qui concerne leurs compétences - faute aux RH d'y avoir créé une dynamique.
Si le gars est en mode "boulet", le coût de la formation est assez conséquent pour la boite. Autrement dit, si pendant 15 ans, tu ne t'es pas intéressé à ce qu'est une adresse non routable.... Il y a beaucoup de chances pour que tu sois très handicapé pendant la formation puisque tu dois apprendre le B-A-BA plus les vraies techniques DevOps. Ca fait beaucoup à la fois.
Donc la question : pourquoi garder un boulet dans la boite ? Les gens dits incompétents peuvent cacher beaucoup de choses, des problèmes perso, de dev personnel ou de compétences qui à leur tour peuvent influer sur les deux précédentes. Entretien(s), plan d'action, formation. Si rien ne change, pourquoi le garder ?
Autre aspect évident:
une fois que le mec aura augmenté sa valeur sur le marché de 40k+ à 50k+, il y a peu de chances pour qu'il reste dans la boite à un prix de 40k+. C'est juste mécanique.
Oui, sauf qu'il voudra peut-être rester dans une boite qui prend le temps de le former et de forger ce lien de confiance. Cette impression, avec celle d'être utile et de progresser dans un cadre de cohésion, dépasse largement les notions de rémunération. Encore faut-il qu'ils y soient sensibles, ce qui est difficile à ancrer si on a des employés en mode mercenariat/course à la rém. Heureusement ce n'est pas toujours le cas, tout comme les meilleures rémunérations ne créent pas meilleurs milieux de travail. Là encore, la perception freelance doit être nuancée cf. la perception du CDI-sé... amha.
On rappellera que l'efficience est un marqueur de la performance, et qu'elle n'est jamais atteinte par l'augmentation de la performance en elle-même, mais à travers la maitrise du process. Et la maitrise d'un process passe forcément par une maitrise des compétences techniques du domaine occupé...
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Droopyann
Nombre de posts : 3675Nombre de likes : 1828Inscrit : 21 mai 2018Ce fil de discussion amène une nouvelle fois beaucoup de réflexions.
Pour moi, je vois la rémunération comme un facteur de démotivation.
Ponctuellement, ça peut être un petit plus, mais on s'habitue très vite.
Par contre, une petite baisse, ou une comparaison avec le collègue d'à côté qui à 20% en plus, et hop, bye bye la motivation.
C'est donc un élément (très) important mais qu'il faut prendre dans le bon sens.
Des bonnes conditions de travail (missions intéressantes, cadre de vie, bienveillance, formation ...) sont les éléments principaux de fidélisation. Il faut juste s'assurer d'une cohérence globale.
Dans le cas que cite DevAndOps, le problème vient d'un décalage trop important entre la grille et la réalité. On est sur du 25% d'écart, c'est intenable.Avoir une grille, ça peut être intéressant, notamment pour l'égalité homme / femme. Mais si au final, on est obligé de sortir de la grille pour coller à la réalité, ça n'a plus aucun sens.
J'ai fait une mission dans un grand groupe où la grille des prestations était compliquée. Tout le monde était CdP senior pour coller à la grille, alors qu'en fait c'était des missions de dev, d'amoa, de BA ... Ca devient n'importe quoi, personne ne comprend ses missions au final.Pour la formation, ce n'est pas forcément donné à tout le monde d'être très curieux et proactifs. J'ai vu, et je vois encore, beaucoup de personnes qui sont très passives dans leurs carrières professionnelles. Aucune réflexion à court, moyen ou long terme.
Mais ce ne sont pas forcément des personnes qui ne veulent pas se former.
Un véritable accompagnement de l'entreprise peut en intéresser certains. Mais c'est un vrai investissement. Et il faut que ce soit accompagné d'un vrai temps avant, pendant et après.
J'entends par là qu'il faut prévoir du temps en amont pour préparer la formation, que le temps de formation soit vraiment dédié à la formation (pas sollicité ou pas de surcharge de travail après la formation) et qu'après la formation, la personne formée ait le temps et la possibilité de mettre en œuvre ce qu'elle a appris.
Ca représente beaucoup de conditions à mettre en œuvre.La notion de valeur est fondamentale pour le plan de carrière.
Peu de personnes comprennent ce concept. Les indeps y sont un peu plus sensibles, mais pas tous.
Se poser la question de la valeur qu'on apporte à l'organisation, des concurrents (internes ou externes), de la valeur dans le temps ... c'est ça qui permettra d'être bien positionner dans l'avenir.-- Yann EURL IS depuis 2019 -
bendk97
Nombre de posts : 172Nombre de likes : 22Inscrit : 25 janvier 2007Les grilles salariales appartiennent au passé. C'est le marché qui fait les prix. Les talents sont comme des fruits et légumes achalandés en supermarchés. Si la mangue est très demandée, les prix montent, si la fraise est en surproduction les prix baissent....etc
Donc c'est ridicule aujourd'hui de vouloir fixer des prix dans des grilles rigides et trop généralistes. Meme dans un métier donné, il peut y avoir des disparités sur le marché en fonction du langage, des technos...etc
Utilisateur suppriméTout ce que tu dis est vrai.
Il faut également considérer le contrôle de la masse salariale. C'est pour cela que je penche plutôt pour des mécanismes de type
"prime d'expertise" : qui permettent d'entrer et de sortir du mode expert. Par exemple, pour passer du mode expert au mode manager.
"statut d'expert" : qui taggue, une fois pour toutes, l'employé en "EXPERT" mais qui a le défaut d'enfermer la personne dans ce statut. Donc, mobilité professionnelle réduite.